Les conflits de motivation en éducation animale
Qu’est-ce que c’est ?
Il est possible d’expliquer de nombreux comportements grâce aux conflits de motivation. Le chien est un animal opportuniste. Il agit en fonction de ce qui va lui apporter le plus de satisfaction, ou en tout cas, ce qui lui permettra d’en perdre le moins.
Le concept de conflit de motivation est valable pour nous également, le comprendre peut vous aider à mieux appréhender certaines réactions de votre animal.
Voici comment nous pouvons nous appliquer le concept de conflit de motivation :
Imaginons que vous êtes dans une rue commerçante et que c’est la période des soldes. Vous rentrez dans votre magasin préféré et tout est à – 50% : le rêve !!! Le magasin est bondé mais vous réussissez à dénicher LA pièce qui manque à votre garde-robe. Vous devez l’essayer pour voir si elle est à votre taille mais la queue aux cabines est longue, et vous avez une furieuse envie d’aller aux toilettes. Le magasin ne rembourse pas et vous ne pouvez pas attendre… Pour la majorité d’entre nous, vous allez choisir d’assouvir ce besoin naturel en priorité, tant pis pour cette petite robe qui aurait fait un si bel effet au mariage du cousin.
Acheter une robe à -50% = agréable vs. Impossibilité de soulager un besoin pressant = désagréable
Cet exemple illustre bien l’adage selon lequel : choisir c’est renoncer ! Les besoins primaires à assouvir sont souvent ceux qui ne souffrent d’aucune hésitation insoluble, c’est l’instinct qui dicte la conduite : manger, dormir, se soulager, fuir le danger, se protéger…
Il existe des situations où deux besoins primaires s’affrontent :
Affamé, vous rentrez dans un restaurant. Votre plat bouillant est servi mais et l’alarme d’incendie se déclenche. Vous fuyez le danger ou vous finissez de vous rassasier ?
Faim = désagréable vs. Se faire brûler = désagréable
En fonction de ce qui est le plus agréable ou le plus désagréable nous choisirons l’option qui nous apparait la meilleure. Il n’y a pas de réponses universelles, dans les conflits de motivation, l’opinion, les habitudes, les besoins, les expériences précédentes… prennent toutes leur importance.
Dans certains cas, une même source de motivation peut être à la fois agréable et désagréable. L’élément se confronte alors à lui-même :
Vous aimez les films d’horreur mais vous sursautez au moindre bruit et vous mettez les mains devant les yeux lorsque cela devient trop intense.
Film d’horreur : excitation / adrénaline = agréable vs. Film d’horreur : faire des cauchemars = désagréable
Les situations qui opposent une chose agréable à une chose sans intérêt voire désagréable sont facile à résoudre, à moins d’être maso, on va se diriger vers ce qui nous apporte de la satisfaction :
Dans mon cas si on me disait : « Tu préfères enfiler des perles tout l’après-midi, ou aller faire une grande balade à cheval sur la plage ? », je n’hésiterais pas longtemps.
Bref vous avez compris l’idée.
Le conflit de motivation utilisé pour l’apprentissage du rappel
Pour comprendre ce choix il convient de donner des points imaginaires aux situations :

Voici comment cela se présente :
- Vous êtes dans votre salon et vous appelez votre chien alors qu’il est tranquille dans son panier. L’environnement est connu, banalisé donc peu stimulant sans être pour autant désagréable, comme pour moi avec les perles. Si vous l’appelez en le motivant (d’une voix joyeuse, en vous accroupissant), la plupart du temps le chien va s’approcher, car il n’a rien de mieux à faire… Même si c’est un peu décevant il faudra tout de même le récompenser pour renforcer ce comportement.
La maison = 0 VS Vous = +2
Le rappel dans un environnement connu non stimulant, c’est un début, mais pas hyper utile.
- L’exercice va se répéter dans le jardin. L’environnement gagne un petit point imaginaire sur sa valeur « agréable », mais comme c’est son jardin, qu’il le connait, et qu’en plus, il n’y a pas de copain au grillage du coup, il devrait venir quand vous allez l’appeler. Du coup : petit renforcement positif en le récompensant.
Le jardin = +1 vs. Vous : +2
Une fois que le rappel est acquis dans un environnement connu, on augmente la difficulté.
- L’exercice se poursuit dans la rue. L’environnement devient plus intéressant car il y a plus d’odeurs étrangères.
La rue = +2 vs. Vous = +2
Dans un cas où les deux situations ont le même niveau de motivation : votre chien va hésiter à répondre au rappel… Si à ce moment-là un stimulus se produit, la balance pourra pencher d’un côté comme de l’autre.
- C’est à vous de jouer : en voyant que votre chien hésite : claquez des mains sur vos cuisses en l’appelant avec plus d’entrain pour faire penche le choix en votre faveur. S’il revient, il faut le récompenser avec une friandise un peu plus appétante (voir l’article sur la notion de valeur appétitive).
En corsant doucement l’environnement, vous arriverez à faire en sorte que votre chien revienne à chaque rappel. Sans oublier de le récompenser. Ce faisant, vous allez gagner des points de « popularité » car il a appris qu’il a droit à une friandise à chaque fois qu’il revient. Quand je vous dis qu’ils peuvent être opportunistes 😉
Imaginons que vous soyez trop pressé et que vous n’ayez pas pris la peine d’augmenter graduellement les stimuli :
- Le chien est lâché dans un parc bondé et vous tentez de le rappeler
Le parc = +3 vs. Vous = 0
- Dans ce cas, il n’y a pas de débat, le chien ignore l’appel et va jouer avec les potes…Vous ne comprenez pas qu’il ne revienne pas alors qu’il revient toujours quand il est dans le jardin.. Au bout d’un moment vous allez commencer à vous énerver car il est tard et qu’il commence à pleuvoir. Vous allez crier, menacer avec la laisse, essayer de lui courir derrière… grave erreur car non seulement le conflit de motivation va évoluer en votre défaveur mais en plus vous allez perdre au passage quelques point de motivation, ce qui est préjudiciable pour cette fois et les fois prochaines…
Le parc = +3 vs. Vous = -1 ou pire….
Ce qu’il faut retenir pour le rappel
Il convient d’évaluer la valeur que votre animal attribue à l’environnement, (si cela est possible, en le laissant par exemple, l’explorer pour le rendre moins intéressant avant de tenter un rappel) et la valeur qu’il nous attribue (avec des bouts de viandes séchées, on vaut plus cher 😉…). Il débuter avec une côte de popularité nettement excédentaire pour apprendre le rappel facilement, puis au fur et à mesure, augmenter les sources de stimulation extérieures et leur valeur (congénères, humains, odeurs de gibiers…). Ce type d’environnement ne pourra être testé en libre, que lorsque le rappel sera parfaitement acquis.
Le conflit de motivation pour résoudre certaines craintes
Dans d’autres situations l’hésitation est de mise :
- Mon petit chien Nappy est un fan de balle, mais de part son histoire de maltraitance il a aussi beaucoup de peurs, et l’aspirateur en est une. Il a beau, depuis presque 2 ans me voir le passer tous les jours, il reste sur ses gardes face à cet engin bruyant qui fait disparaitre des trucs. Même à l’arrêt il a tendance à l’éviter. Comme il a aussi peur des bâtons et du balaie, je pense que ce qu’il craint c’est le tombe et par extension, le tuyau de l’aspirateur. C’est une chose de savoir ce quoi notre chien a peur, d’en connaitre ou pas l’origine, c’en est une autre de l’aider à la surmonter. La motivation que constitue la balle peut y contribuer.
Lorsque sa balle atterrie à côté de la machine, il va se trouver dans un conflit de motivation :
Se rapprocher de ce qui lui fait peur pour accéder à la balle, et l’envie impérieuse de la récupérer.
L’aspirateur = -3 vs. La balle = +3
Ce qui peut l’aider c’est la stimulation par le jeu mais également les encouragements.
- Je ne le force pas à aller plus vite que sa musique. Je place la balle à un mètre de l’aspirateur, et petit à petit je la rapproche de l’engin. Pris dans le jeu il ne s’en aperçoit pas si je ne brûle pas d’étapes Dès que la proximité de sa source de peur le fait hésiter au point de l’empêcher d’attraper son jouet, c’est que je suis allée trop vite. Je reprends à l’étape précédente lorsque l’attraction pour la balle était la plus forte. Cela peut prendre du temps, mais l’idée est qu’il intègre l’aspirateur dans son environnement de jeu pour qu’il le banalise jusqu’à faire chuter à 0 sa cote de répulsion.
En conclusion
Comprendre ce qui motive votre chien peut vous aider à maîtriser son comportement.