Les étapes du développement comportemental du chiot

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Les étapes du développement comportemental du chiot

Sommaire

  • Ce qu’il faut savoir pour commencer
  • La période prénatale
  • La période néonatale
  • La période transition
  • La période socialisation
  • La période juvénile
  • La puberté
  • Ce qu’il faut retenir

Ce qu’il faut savoir pour commencer

Lorsqu’il nait le chien ne sait pas qu’il appartient à l’espèce canis familiaris, il va l’apprendre au contact de sa mère et de sa fratrie.

Son caractère est conditionné par son patrimoine génétique, par les expériences vécues in utero et celles qu’il va avoir avec son environnement. Il va percevoir ces interactions de manière positive ou négative et leur impact va dépendre de son tempérament et de son stade de développement.

Son comportement peut aussi évoluer au cours de sa vie en fonction de son état physique et de son âge.
Il est donc essentiel de prendre en considération ces différents aspects et d’essayer, dans la mesure du possible, d’analyser ses réactions en se mettant à sa place.
Lorsque j’ai adopté ma chienne Heidie elle avait 2 ans. Je n’avais que peu d’informations sur son passé, si ce n’est qu’elle avait été délaissée au point d’avoir fait l’objet d’une décision judiciaire.

J’ai tout de suite vu qu’elle était méfiante vis-à-vis des hommes, elle ne se laissait pas facilement approcher et pouvait parfois leur aboyer dessus.

Néanmoins, à force de patience et en avançant à son rythme j’ai réussi à lui redonner confiance et désormais, à la terrasse d’un café, elle va chercher des caresses auprès de tous ceux qui seront prés à lui en donner.

Cependant, je n’ai pas réussi à corriger toutes ses appréhensions, certaines craintes sont ancrées, il faut faire avec et trouver des stratagèmes pour les rendre le moins pénible possible. Cela se produit chez les chiens de refuge mais également les chiots issus d’élevages peu scrupuleux.

Avant d’acquérir un chiot, ou pour comprendre certaines réactions d’un chien adulte, je vous propose de nous plonger dans les différentes périodes dites « sensibles » qui jalonnent son développement.

Il existe 6 périodes sensibles dans le développement d’un chiot.

1) La période prénatale :

La période de gestation d’une chienne est d’environ 2 mois.

A partir du 35ème jour de gestation, le chiot, depuis le ventre de sa mère est en mesure de percevoir des sensations qu’elles soient agréables ou non et réaliser de nombreux apprentissages qui influenceront son développement.

En ce qui concerne le sens tactile, in utero, les chiots peuvent ressentir les pressions effectuées sur l’abdomen de leur mère. Dès cette période ils pourront faire des associations positives ou négatives à ce contact en fonction du ressenti de cette dernière (bienêtre ou stress).

L’autre sens qui se développe à cette période est l’odorat. Une étude a été menée au cours de laquelle une chienne gestante a été nourrie avec des aliments ayant une saveur anisée. Il a été démontré que dès la naissance les chiots étaient attirés par cette odeur. Cette étude montre que les chiots sont capables de reconnaitre, sélectionner et mémoriser les odeurs.

Si j’avais eu la maman d’Heidie, j’aurais agrémenté sa nourriture de morceaux de truffe 😉

2) La période néonatale : de 0 à 14 jours

A la naissance, le chiot est incapable de sortir du nid, il est, comme nous, une espèce nidicole. Si les sens tactile et olfactif ont pu fonctionner dès la période de gestation, la vue et l’ouïe ne sont pas encore fonctionnelles. Il n’est pas non plus capable de se mouvoir autrement qu’en rampant vers l’avant, il ne peut pas réguler sa température interne et la fonction digestive doit être stimulée par la mère générant le réflexe périnéal (stimulation tactile provoquant la miction et la défécation). Ces paramètres le rende particulièrement vulnérable et très dépendant de sa mère.

Son comportement se limite à des réflexes primaires : de fouissement (pour trouver un contact chaleureux ou une source de nourriture), de pétrissement (pour stimuler la lactation), labial (en orientant les babines et la langue vers la mamelle), de succion (pour aspirer le lait) et de déglutition (pour avaler l’aliment). L’ensemble de ses réflexes occupent 5% de sa journée, le reste du temps il dort. Ces réflexes garantissent la survie du chiot en le contraignant à rester près d’une source de nourriture et de chaleur. Si le chiot n’est pas encore attaché à sa mère, en revanche cette dernière développe pendant cette période un lien de plus en plus fort, garantissant la survie de sa progéniture. Ce phénomène est lié à la production d’ocytocine (hormone de l’attachement) pendant la lactation. Ce lien n’étant pas inné, cela permet à un chiot orphelin de trouver une seconde mère et à une chienne allaitante d’accepter des chiots qu’elle n’a pas mis au monde.

Les soins apportés par la mère à son chiot pendant cette période contribueront également à le rendre plus autonome et plus sociable par la suite.

3) La période de transition : de 15 à 21 jours

Elle démarre avec l’ouverture des yeux et se termine avec l’acquisition de l’audition et la possibilité de se tenir sur ses quatre pattes. Même s’il a encore besoin de sa mère pour stimuler sa fonction d’élimination, cette période de maturation sensorielle lui permet de devenir un peu plus autonome.

C’est également pendant cette phase que l’attachement réciproque chiot / mère se met en place. Cette évolution est un gage de sécurité car cela lui permet de découvrir son environnement tout en revenant vers sa mère suivant un mode exploratoire en étoile.

Le caractère de la mère peut influencer le développement du chiot. En effet si elle est peureuse, stressée ou craintive, par mimétisme et grâce à ses capacités olfactives (en détectant la sécrétion d’hormone de stress : le cortisol), le chiot pourra reproduire ces comportements.

4) La période de socialisation : de 3 à 12 semaines

Au cours de cette phase dont la durée peut être plus importante pour les chiens de grande taille, le chiot va construire son seuil d’homéostasie sensorielle. C’est-à-dire sa capacité à maintenir une stabilité émotionnelle en dépit des variations de son environnement. Ses capacités motrices et son tempérament vont le conduire à s’aventurer de plus en plus loin de sa mère.

Le détachement est accru par le fait qu’à partir de la 3eme semaine, la maman commence à refuser l’allaitement, les dents de lait la faisant souffrir. Ce comportement maternel pousse le chiot à s’autonomiser et favorise ainsi les interactions sociales avec les individus que l’entourent.

Jusqu’ à 7 semaines, sa nature curieuse est renforcée par le fait d’être instinctivement attiré par ce qui est nouveau (néophilie). Il va s’approcher, sentir, toucher, mordiller tout ce qu’il ne connait pas. Cet instinct va pouvoir lui faire faire de nouvelles découvertes, appréhender des situations inédites et réaliser de nombreux apprentissages indispensables à son bon développement. Il est donc important qu’il vive à cet âge des expériences qu’il pourra rencontrer par la suite (environnement bruyant, agité, odeurs nouvelles, différents types d’individus humains, espèces jusque-là inconnues…).

A partir de la 8ème semaine, il rentre dans une phase dite d’aversion. Il devient naturellement méfiant de tout ce qu’il ne connait pas (néophobie). Aussi, les associations négatives qu’il pourra faire pendant cette phase, surtout si elles sont répétées, seront mémorisées et pourront modifier son caractère et donc son comportement une fois adulte.

Au cours de la socialisation, la plasticité cérébrale du chiot (ensemble des mécanismes permettant à un cerveau de modifier ses connexions neuronales pour acquérir de nouveaux apprentissages) est à son paroxysme. Toute situation nouvelle va lui permettre de réaliser un nouvel apprentissage, acquérir de nouvelles informations et adapter ses comportements pour y répondre.
A l’issue de cette phase, les neurones qui n’auront pas créé de connexions seront perdus. Ce phénomène permet au chiot de faire le tri pour ne conserver que ce qui lui sera utile dans sa vie d’adulte.

Pendant la socialisation, le chiot va également découvrir les codes sociaux (appel au jeux, attitudes à adopter pour éviter les conflits, signaux d’apaisement…) grâce à ses interactions avec sa fratrie et avec les adultes qui l’entourent. Ces derniers en régulant les bagarres pourront lui montrer les limites à ne pas franchir. Le chiot va apprendre les auto-contrôles : s’arrêter lorsqu’il est trop turbulant, maitriser sa morsure et la position de soumission ritualisée.

5) La période juvénile : de 3 mois à la puberté

Cette période n’est pas fixe puisque la puberté intervient à des âges différents en fonction de la race et du type de chien. Elle permet de consolider les acquis, de renforcer les apprentissages (autocontrôles, jeux sociaux, communication…), d’augmenter le degré d’autonomie et d’amorcer le détachement du groupe familial pour lui permettre de nouer d’autres relations avec les individus qui l’entourent.

6) La puberté :

La race et le type de chien déterminent la durée de cette phase, elle se situe :

  • entre 5 et -6 mois pour un chien de petite taille < 10kg
  • entre 7 et 10 moins pour un chien de taille moyenne < 25kg
  • entre 16 et 18 mois pour un chien de grande taille > 25kg

Elle correspond à une période de maturation sexuelle qui s’observe par le fait de lever la patte pour uriner. C’est un mode de communication, l’adolescent renforce son message olfactif par un message visuel.

La puberté se manifeste chez la femelle par l’apparition des premières chaleurs.
Le jeune chien change d’aspect physique et commence à ressembler de plus en plus à ses géniteurs.

Certains conflits peuvent apparaitre avec d’autres chiens car il déborde d’énergie, il est submergé par ses hormones et découvre de nouveaux comportements. De plus, étant désormais sexuellement mature, il est considéré comme un rival potentiel (surtout si c’est un mâle) et les adultes sont généralement moins patients.

Ce qu’il faut retenir

Tout au long de la vie du chien, l’humain doit rester son repère, garant de sa sécurité, de sa réassurance, de son confort et de son bienêtre.

Ayant adopté Heidie adulte, je n’ai pas eu la chance de l’accompagner au cours de ces différentes étapes. Elle est arrivée dans notre famille avec certaines carences et des appréhensions. Mais les activités ludiques que je lui ai proposées, les rencontres positives qu’elle a eu et le fait de lui faire découvrir un maximum de situations différentes dans un environnement sécurisant et valorisant ont eu raison de certaines de ses craintes.

Ainsi il est toujours possible de rééduquer un chien, même si son histoire est digne d’un roman de Zola, la clé étant la patience, le calme, la sécurité, la confiance, la bienveillance, l’empathie et l’amour et ce, à tous les stades de sa vie.
Une méconnaissance des étapes clés de son développement peuvent conduire à un certain nombre de syndromes qui viendront gâcher sa vie d’adulte et son intégration dans la famille.

Un chiot qui aura été séparé trop tôt de sa mère et sans adulte régulateur, peut, par la suite développer, outre une anxiété de séparation avec ou sans hyper attachement, un comportement hyperactif-hypersensible. Cela se traduit par une incapacité à s’arrêter, aucun auto-contrôle et une sensibilité accrue au moindre stimulus.
Un chiot qui n’aura pas été suffisamment ou convenablement stimulé pendant les périodes sensibles, pourra présenter un syndrome de privation sensorielle. Ce trouble se caractérise par une incapacité à s’adapter à son environnement, il peut même refuser les sorties et les jeux ne se sentant en sécurité que dans son lieu de vie.
Dans ces cas extrêmes mais relativement fréquents, en fonction des stades de développement des syndromes, la thérapie comportementale devra être associée à une thérapie médicamenteuse mais la guérison n’est pas garantie.
L’acquisition d’un chien ne se fait donc pas sur un coup de tête.

Dans tous les cas, si votre chien développe certains comportements inadaptés, il convient avant toute thérapie comportementale de vérifier auprès de votre vétérinaire qu’il ne souffre pas d’une pathologie qui pourrait affecter ses réactions.
J’ai pu intervenir auprès d’une chienne récupérée dans un refuge qui après plusieurs mois de vie harmonieuse dans son nouvel environnement s’est mise à pincer les étrangers. La visite chez son vétérinaire a permis de mettre en évidence des douleurs arthrosiques et une cataracte naissante. Ainsi, une sensibilisation des personnes qui l’entoure et un traitement adapté ont permis de remettre les choses dans l’ordre.

Pour en savoir plus :

  • Ce qu’il convient de faire pendant les différentes périodes sensibles du développement d’un chiot
  • Chiens d’élevage ou chiens de refuge ?
  • Le mythe du chien dominant